La plateforme aéroportuaire de Lyon sera prochainement privatisée : l’Etat s’apprête à vendre les 60 % qu’il détient dans la société gestionnaire de Saint Exupéry et Bron.
Comme celle de Toulouse récemment et bientôt celle de Nice, la plateforme aéroportuaire de Lyon sera prochainement privatisée : l’Etat s’apprête à vendre les 60 % qu’il détient dans la société gestionnaire de Saint Exupéry et Bron*. La question est donc sur toutes les lèvres : qui sera le futur gestionnaire de la plateforme ?
Un premier candidat vient de se déclarer. Il s’agit de Cube, un fonds d’investissement né dans l’orbite de la Caisse des Dépôts et de Natixis (groupe BPCE), regroupant une vingtaine d’actionnaires dont des caisses de retraite et des investisseurs institutionnels. S’affichant comme un opérateur de long terme, Cube a voulu s’attacher les compétences d’un gestionnaire d’aéroport. Ses dirigeants sont donc allés frapper à la porte de… Genève Aéroport, établissement appartenant à l’Etat de Genève.
En effet, leur stratégie est de jouer la complémentarité régionale entre deux plateformes distantes de 130 kilomètres : d’un côté, Lyon-Saint Exupéry et ses 8,5 millions de passagers, avec des dessertes principalement européennes et des capacités d’extension très importantes ; de l’autre, Genève avec 15,2 millions de passagers, des liaisons long-courriers, mais une saturation à prévoir dans les dix ans pour cet aéroport très urbain.
Le Canton de Genève, par la voix du Conseil d’Etat, a donné son assentiment au projet. “Des contacts avec les collectivités locales françaises et le milieu industriel rhônalpin seront poursuivis afin d’inscrire le projet dans une vision de cohérence territoriale élargie”, précise un communiqué. Pierre Germain, directeur finances, commercial et développement de Genève Aéroport, analyse la situation : “Lyon ne dispose pas d’une plateforme à la hauteur du poids économique de la région qu’elle dessert. En Europe, son aéroport se situe à la 47ème place alors que Rhône-Alpes fait partie du top 10 des régions. Ce décalage est dû au fait qu’Air France poursuit une stratégie de hub unique, ce que l’on peut parfaitement comprendre et respecter. Mais la compagnie ne peut pas, dans le même temps, bloquer les droits de trafic sur les aéroports français de province : les long-courriers sont aujourd’hui centralisés sur Paris et, sur ce plan, les aéroports régionaux sont bridés”.
Une compagnie nationale qui fait la pluie et le beau temps en fonction de ses propres ambitions : Genève en sait quelque chose, elle qui a dû se battre contre Zurich jouant avec la compagnie Swiss le même rôle centralisateur. Aujourd’hui, la cité de Calvin dispose de 27 liaisons intercontinentales directes (New York, Washington, Chine, etc.)… toutes desservies par des compagnies étrangères.
De son côté, la CCI de Lyon s’est déclarée très favorable au dossier Cube. Alors, quelle sera la décision de l’Etat ? Il est encore trop tôt pour le dire. D’autres candidatures sont à prévoir, en particulier celle d’Aéroports de Paris (ADP) qui ne manquerait pas de susciter l’hostilité d’élus rhônalpins excédés par le centralisme parisien.
Une chose est sûre : le moment est historique. Que deux aéroports séparés par une frontière, complémentaires certes mais aussi concurrents, envisagent de travailler ensemble… voilà une nouvelle approche pour une région franco-suisse qui entend prendre son destin en main. Le sens de l’Histoire, disent certains.
Didier Durand
@didierldurand
*Les autres actionnaires : CCI de Lyon (25 %), Conseil départemental du Rhône (5 %), Région Rhône-Alpes (5 %) et Grand Lyon (5 %).
Photo : ©Genève Aéroport.
Bref Rhône-Alpes n° 2210 du 16/07/2015
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