Pas une semaine sans l’annonce, dans nos colonnes, d’une levée de fonds via le financement participatif : après avoir été réservée aux initiés, cette autre façon de faire appel à l’épargne publique (en clair, à vous et moi, via Internet) émerge.
On compterait ainsi une centaine de plateformes de crowdfunding en France. Même les institutionnels s’y mettent : la CCI de Lyon lancera officiellement la sienne le 29 octobre prochain (en collaboration avec Wiseed). Pas de doute : quelque soit sa forme (prêts, dons ou apports en capital), le crowdfunding séduit. Il permet aux jeunes entreprises de disposer d’une source de financement rapide tout en validant la pertinence d’un projet ; et aux investisseurs de soutenir un projet coup de cœur voire une pépite pleine d’avenir.
Le “financement par la foule” court-circuite le monde bancaire. Attirant la sympathie d’un certain public à travers l’image qu’il véhicule (la démocratisation de la finance), s’appuyant sur le raz de marée Internet et ses avatars (réseaux sociaux), sur l’attrait des start-up et d’une “autre” économie cassant les codes, le phénomène n’est plus seulement une mode, même s’il est surmédiatisé.
Certes, il est encore marginal : les sommes totales collectées en France sur le premier semestre 2014 s’élèvent à 66 millions d’euros. Mais il grossit très vite(1), à tel point qu’il a poussé le gouvernement à légiférer pour mieux encadrer ces apports de cash aux entreprises.
De son côté, l’association Lyon Place Financière et Tertiaire tempère l’enthousiasme ambiant en pointant quelques faiblesses(2). Comme le manque de solidité financière et technique des plateformes : de très petites tailles, celles-ci doivent pourtant assumer des frais de gestion de plus en plus lourds (études de dossiers, information des investisseurs, …) qu’elles ne facturent pas encore, généralement, leur priorité restant la course aux dossiers. Elles doivent aussi respecter les obligations de lutte contre le blanchiment d’argent, tout en s’assurant que les informations diffusées par l’émetteur ne sont pas erronées. “Que se passera-t-il (…) en cas de défaillance de ces plateformes de crowdfunding ?”, interroge LPFT.
Des défaillances auxquelles il faut pourtant s’attendre après la période euphorique initiale. Pour l’investisseur, ce risque s’ajoute à celui des placements dont la rentabilité n’est, bien sûr, jamais garantie. Quant à l’entreprise candidate au crowdfunding, elle devra compter avec un grand nombre de petits actionnaires qu’il faudra informer régulièrement, ce qui demandera du temps au dirigeant.
Encore naissant, le crowdfunding s’apprête à bousculer le paysage financier. Après avoir souri, certaines banques prennent désormais les choses au sérieux (voir les partenariats de la Société Générale ou du Crédit Coopératif avec des plateformes). Et lors de son récent congrès national à Lyon, l’Ordre des experts-comptables affirmait pouvoir contribuer à la sécurisation de ce nouveau mode de financement de l’économie. Des signes qui ne trompent pas.
Didier Durand
@didierldurand
(1) Contre 78 millions d'euros sur toute l’année 2013 (et 8 millions d'euros en 2011).
(2) Le crowdfunding : Financement à la mode ou Nouveau mode de financement ? Septembre 2014.
Bref Rhône-Alpes n° 2177 du 22/10/2014
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