Ancien de Handicap International, le directeur de l’agence web Acti, également Pdg de la chaîne de télévision TLM, est de plus en plus présent dans le paysage économique lyonnais.
S’entretenir avec Laurent Constantin, c’est comme naviguer pour la première fois sur un voilier secoué par la houle. On s’accroche fermement au bastingage en essayant d’imprimer le rythme des vagues… sans réellement y parvenir. Doté d’un dynamisme hors du commun et d’une volonté de fer, souriant dans son sweat capuche siglé Apple, le dirigeant d’entreprise fait pourtant l’impression d’un adolescent attardé. Le considérer comme tel serait une erreur : il a plus du moine guerrier que du “geek”. Dans son bureau “sobre et efficace” de la rue Garibaldi (Lyon 7ème), Laurent Constantin concède d’ailleurs qu’il aurait pu être moine : “Je sais me concentrer sur un objectif unique”.
Cette sobriété et cette passion de l’effort, il les doit sans doute à ses parents, tous deux employés de bureau, qui lui ont inculqué deux valeurs fondatrices : l’honnêteté et le travail. Scolarisé au lycée Saint-Thomas d’Aquin d’Oullins, dont il a fait gravé la devise latine Esto Vir - Sois un homme - sur le revers de sa montre, il a poursuivi son parcours académique dans une école de commerce d’où il est sorti avec un Bac +5. Impossible néanmoins de connaître le nom de l’établissement fréquenté : “La société française se meurt des titres et des diplômes”, lâche-t-il.
Appelé à faire son service militaire, il choisit le service civil et s’engage en 1995 pour une période initiale de deux ans chez Handicap International. Il y restera cinq ans. Chargé de collecter des fonds privés à une époque où les levées sont mal perçues dans l’humanitaire, il lance, avec une petite équipe, le sac à sapin. “Nous avions dix ans d’avance sur les autres ONG”. Le succès est immédiat : 700 000 unités sont écoulées chaque année, pour une collecte de 2,3 millions d’euros. Un plan média gratuit est mis en place. L’association, sollicitée par la grande distribution, doit changer ses habitudes. “Nous partions en rendez-vous en costume cravate, ce qui pouvait être mal perçu par la vieille garde. La majorité de mon énergie était consacrée à convaincre en interne”. Soutenu par Jean-Baptiste Richardier, fondateur de l’ONG, il parvient cependant à décliner le concept sous plusieurs formes : collerette à sapin, “kit plio” pour couvrir les livres et cahiers à la rentrée…
C’est un accident de voiture - une sortie de route sans gravité - qui le persuade de changer de voie au début des années 2000. Alors âgé de 27 ans, il devient directeur général adjoint de la start-up Consoshop, réseau de boutiques proposant une série d’offres promotionnelles gratuites, à Toulouse. “L’humanitaire est enrichissant, passionnant, mais je voulais embrasser une carrière plus lucrative tout en levant un peu le pied”. Mais suite à un différend, l’expérience tourne court ; Laurent Constantin revient à Lyon.
Désireux de maîtriser sa destinée, il se tourne vers l’entrepreneuriat et rachète l’agence web Acti en 2001, quelques mois à peine avant l’éclatement de la bulle Internet. Patiemment, le réserviste de l’armée de l’air creuse son sillon, transformant au fil du temps la petite entreprise (trois personnes) en société florissante de trente collaborateurs, troisième agence web de Rhône-Alpes, forte d’un chiffre d’affaires de 2,6 millions d’euros en 2014. Laurent Constantin y applique un management horizontal, demandant une forte implication de ses employés. “Chaque entretien de recrutement est effectué en présence d’un salarié, et aucune embauche ne se fait sans sa validation”. Le bureau du dirigeant est d’ailleurs ouvert aux quatre vents, et il n’est pas rare de voir un collaborateur s’y glisser en plein rendez-vous pour y déposer une note ou questionner le patron.
Aujourd’hui bien rentable (résultat net de 450 000 €), Acti permet à Laurent Constantin de s’impliquer dans d’autres projets. Fin décembre, il devient pdg de la chaîne de télévision locale TLM (dont il est actionnaire aux côtés de quinze entrepreneurs) pour laquelle il s’est donné 150 jours pour faire “des changements significatifs” : élargissement de la zone de diffusion au Sud-Ouest de l’Ain et au Nord-Isère, élaboration d’une stratégie digitale, renforcement de l’offre de services (séminaires, média training), mise en place de synergies avec les télévisions locales voisines… Objectif affiché : retrouver l’équilibre en 2015.
Steven Dolbeau
@sdolbeau
Bref Rhône-Alpes n° 2195 du 11/03/2015
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