En une décennie, la société grenobloise Synapcell s’est fait un nom dans le traitement de l’épilepsie, en proposant aux labos pharmaceutiques d’optimiser le développement de leurs médicaments.
Car dans ce domaine, les recherches sont longues et coûteuses : il faut compter entre dix et quinze ans pour créer une nouvelle molécule. Et les résultats ne sont pas toujours à la hauteur : “On constate 80 % d’échecs en phase d’essais cliniques (soit après 6 à 8 ans de R&D), et les médicaments mis sur le marché sont très controversés car encore trop peu efficaces et générateurs d’effets secondaires lourds pour les patients”, explique-t-on chez Synapcell.
C’est dans l’analyse de l’activité électrique du cerveau (la communication entre les neurones) que l’entreprise apporte son expertise : elle est capable de lire, enregistrer et interpréter l’activité cérébrale. L’épilepsie, par exemple, se traduit par un “orage électrique” (pas forcément par des convulsions, comme on l’imagine) que les médicaments devront inhiber. “Chaque pathologie neuropsychiatrique a sa propre signature électrique. Les industriels de la pharmacie nous confient leurs molécules afin que nous en détections, assez tôt dans leur développement, l’efficacité”, explique Yann Roche, directeur général. Une façon de limiter les échecs et d’accélérer la recherche médicale. En dix ans, Synapcell a ainsi qualifié plus de cent molécules au profit de 25 laboratoires à travers le monde.
Sujet tabou, la santé mentale pourrait bien être l’une des grandes préoccupations du XXIème siècle. Aujourd’hui, un milliard de personnes, soit 15 % de la population mondiale, souffre de troubles neurologiques. On compterait trois fois plus de patients diagnostiqués en 2010 qu’en 2005. Avec le vieillissement de la population, l’enjeu de santé publique devient énorme.
Sa technologie appliquée à l’épilepsie étant aujourd’hui reconnue dans le monde entier, Synapcell a décidé de l’appliquer à d’autres maladies neuropsychiatriques : Parkinson, autisme et schizophrénie, en attendant de s’attaquer à Alzheimer. “Ces maladies sont toutes des conséquences de dysfonctionnements neurologiques pour lesquels nous avons identifié des signatures électriques”, poursuit Corinne Roucard, présidente.
Soutenue par des financiers (Rhône-Alpes Création, Expansinvest, Viaduc 8) et des business angels entrés au capital en 2009 et 2010, l’entreprise, bénéficiaire depuis 2011, se prépare donc à accélérer. Alors que son chiffre d’affaires s’est élevé à 890 000 € (+ 30 %) l’an dernier, la direction prévoit 1,3 million d’euros en 2015 et entre 2 et 3 millions d’euros en 2018.
Entre-temps, ses effectifs devraient avoir doublé. Elle emploiera alors vingt personnes dans ses locaux de la pépinière Biopolis, installée face à l’hôpital de La Tronche et à l’Institut des Neurosciences de Grenoble. “Les experts sont à deux pas, c’est précieux”, expliquent les deux dirigeants qui n’hésitent pas à démultiplier les recherches collaboratives. Synapcell est ainsi partenaire du programme COinside, labellisé par le pôle de compétitivité Lyonbiopôle et retenu en mars dernier par le FUI (Fonds unique interministériel), lui donnant droit à des financements publics.
Didier Durand
@didierldurand
Photo : Yann Roche et Corinne Roucard.
Bref Rhône-Alpes n° 2208 du 01/07/2015
Pour en savoir plus sur Bref Rhône-Alpes et ses autres supports.