L’écoquartier des Passerelles.
Jean-Marc Favre
La démarche impulsée par l’équipe municipale élue en 2020 à Annecy pour une meilleure prise en compte des enjeux environnementaux et sociaux se traduit par l’élaboration d’un référentiel du « bien construire » qui s’impose désormais aux constructeurs.
La reconversion d’une partie du site industriel de NTN est le premier programme immobilier à avoir expérimenté le référentiel du « Bien construire à Annecy ». Le maître d’ouvrage, Cogedim Savoies Léman, dont le projet avait été sélectionné à l’issue d’une mise en concurrence organisée en 2018 par le groupe, a accepté de revoir son projet à différents niveaux : ouverture d’une concertation publique, végétalisation, aménagement des espaces publics, orientation et qualité des logements, moindre densité avec 6.000 m² de surface de plancher en moins.
Sur les quatre hectares libérés au fil des années par le transfert d’activités de production en périphérie de l’agglomération, le nouveau quartier représentera une surface de plancher de 48.835 m². Il accueillera 675 logements (locatifs sociaux, accession à prix maîtrisé et accession libre), 5.000 m² de résidences services pour les séniors, 500 m² de commerces et la réhabilitation de la maison des hirondelles (800 m²) qui témoignera de l’histoire industrielle du site. Un parc de 7 000 m² ainsi qu’une chaufferie collective biomasse sont encore prévus.
Un référenciel influent
D’autres programmes immobiliers ont depuis évolué sous l’influence du référentiel. C’est le cas d’un bâtiment de 34 logements initialement prévu sur trois parcelles où le bâti et les espaces boisés existants devaient disparaître. Enlisé face à des recours, le projet, qui risquait d’enclaver les riverains, a été retravaillé : une moindre densité (16 logements tous bi-orientés), des espaces communs plus généreux, la rénovation d’une bâtisse présente sur le site, la conservation de la végétation pour éviter un îlot de chaleur... Sur une autre opération de 45 logements, la densité a été revue à la baisse (37 logements) tandis que la création d’une venelle publique a été décidée et que la végétation existante sera préservée.
Prendre le temps... pour aller plus vite !
Développé dans le cadre du projet de mandat, le référentiel est parti du constat d’un urbanisme à la parcelle, sans vision globale et sans maîtrise de la Ville sur sa destinée. « Face à une production essentiellement impulsée par les acteurs privés, nous menons une démarche à la fois qualitative et durable au travers de ce document construit avec l’ensemble des acteurs de l’acte de construire », résume Nora Segaud-Labidi, adjointe au maire à l’aménagement durable, à l’habitat et au cadre de vie. Le référentiel repose sur trois axes majeurs de la chaîne de l’urbanisation (aménager, programmer, construire). Son ambition est de bâtir des logements de qualité et accessibles à tous, dans une ville à taille humaine apportant des commerces, services et aménagements paysagés soigneusement réfléchis. Les services municipaux dédiés à l’aménagement, au foncier et à l’urbanisme sont désormais rassemblés au sein d’un guichet unique qui s’appuie sur des experts pour analyser toutes les problématiques au regard du référentiel. « Nous prenons le temps de travailler les dossiers mais ensuite la phase d’instruction est beaucoup plus rapide. Les professionnels commencent à dire qu’ils y trouvent leurs comptes à plusieurs degrés. Nous les accompagnons en particulier dans leurs échanges avec les propriétaires de terrains afin de limiter la surenchère foncière », souligne l’élue.
Stop aux chaudières collectives au gaz
Au printemps 2023, le référentiel va faire l’objet d’une évaluation qui pourrait déboucher sur une version 2 intégrant les nouveaux dispositifs législatifs et diverses chartes comme celle portant sur la gestion des terres inertes de chantier.
Annecy échange encore avec les promoteurs sur la programmation en trois tiers (locatifs sociaux, accession libre, accession abordable). Il s’agit d’aborder le plus en amont possible le mode de chauffage des logements en excluant les chaudières collectives au gaz au profit d’un raccordement à un réseau de chauffage existant ou, à défaut, la géothermie, les pompes à chaleur ou les chaufferies bois. La mise en oeuvre de matériaux biosourcés figure aussi parmi les priorités.
Parallèlement, la démarche prospective « Annecy 2050 » conduite avec l’architecte-urbaniste Djamel Klouche et l’architecte-paysagiste Mathieu Lucas entre dans une phase de concertation avec les habitants et les acteurs économiques. L’enjeu est d’imaginer un projet de territoire cohérent, en phase avec les enjeux du dérèglement climatique.
Cet article est issu du hors-série « Territoires durables : Plus belle la ville ! » paru en mai 2023.