La Chambre régionale des comptes a relevé de nombreuses dérives dans les pratiques de la Semcoda dont certaines ont alimenté « la hausse sur le prix moyen du foncier dans le département".
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La Chambre régionale des comptes (CRC) a rendu un rapport au vitriol sur la gestion du bailleur social Semcoda, en passant au crible les exercices budgétaires 2013, 2014, 2015, et 2016.
Si le chiffre d'affaires de la société d'économie mixte a progressé de 44 %, à plus de 262 millions d'euros sur la période en question, en accroissant son développement sur l'accession à la propriété, les magistrats pointent un endettement (+ de 2,5 milliards d'euros) « difficilement soutenable » au regard d'une capacité d'autofinancement insuffisante, et d'une rentabilité passée de 11 % à 5 % en 4 ans, plus de deux fois inférieure « à la médiane des organismes de logement social ». Les magistrats de la Chambre enjoignent le premier bailleur social d'Auvergne Rhône-Alpes (parc de 30.968 logements) à « repenser son modèle économique et sa stratégie de développement ».
Des augmentations de capital qui posent question
La CRC recommande aussi vivement au président du Conseil départemental (Jean Deguerry), premier actionnaire de la Semcoda (plus de 33 % du capital) de resserrer son contrôle. Le rapport dénonce le rôle beaucoup trop prépondérant de l'ancien « directeur historique », Gérard Lévy, lequel s'était arrogé tous les pouvoirs. Les magistrats ont relevé de nombreux abus concernant les frais liés à sa fonction (restauration, déplacements, etc), des dysfonctionnements, des irrégularités et même des pratiques illégales. Exemple : les augmentations de capital, récurrentes depuis 2007 et dont les conditions posent question.
Celles-ci servaient à financer la construction des opérations immobilières. Concrètement, la Semcoda achetait le foncier aux communes à un prix très supérieur à l'évaluation des Domaines tandis que les communes reversaient cette « plus-value » sous forme de participation au capital. Une « avance de fonds » que la CRC estime interdite par le Code de commerce et qui permettait à la Semcoda de bénéficier de financements bonifiés (prêts et aides) de l'État et de la Caisse des dépôts, « ciblés sur la prise en charge du foncier », qu'elle n'aurait pas perçu en payant le « juste prix ». Selon la CRC, la Semcoda aurait alimenté « la hausse sur le prix moyen du foncier dans le département ».
Opacité des marchés publics
L'analyse du fonctionnement des marchés publics met par ailleurs en lumière son opacité. Les magistrats estiment « que la société encourt le risque d'un défaut de mise en concurrence » et pourrait être placée « dans une situation de non-respect des principes européens de concurrence et d'égal accès à la commande publique ». Plusieurs exemples sont cités, dont celui de trois sociétés de la Côtière, gérées par le même chef d'entreprise, ayant bénéficié de commandes de travaux d'entretien hors procédures, pour 1,9 million d'euros.
La lecture des 80 pages de ce rapport relève d'autres dérives, comme des conflits d'intérêts impliquant deux anciens présidents directeurs généraux.